Atelier Gilbert

GILBERT
Biographie

Gilbert est né le 6 novembre 1985 à Mulhouse. Ça n’a peut-être pas d’importance, ou peut-être si. Novembre : le mois gris; une sensation de malaise diffus, Joy Division un dimanche soir quand votre vie paraît avoir autant de sens qu’une paillette sur une assiette de boudinpurée. Ou bien novembre, ce mois où vous avez tout plaqué, votre boulot, votre mec et vos peurs. Qui sait, à part vous ?

Gilbert est né le 6 novembre 1985 à Mulhouse, et on ne sait pas si cela a un rapport avec ce qu’il cherche à révéler, à savoir : les pulsions sagement plastifiées par nos normes et ce que nous refusons de voir de notre personnalité ; mais aussi la beauté insoupçonnée, celle qu’on croise parfois des dizaines de fois, avant qu’elle nous cueille enfin (le fameux sac plastique d’American Beauty, vous voyez ?).

Plus encore, ce qu’il cherche à capturer, ce qu’on a tous vécu mais qu’il est si difficile de conserver pour la postérité, c’est cette charge électrique qui jaillit dans nos poitrines quand par miracle, notre sensibilité rencontre un objet qui la chamboule.

Dans une autre vie, il aurait pu être dresseur de poney cosmique ou médium révélateur d’auras, mais si on y réfléchit, la photographie, c’est un peu ça. Surtout quand on est né un 6 novembre 1985 à Mulhouse, du moins si vous pensez qu’il y a un rapport.

 

À propos des images ci-contre

Réfractions est une série de photographies comptant actuellement 17 images présentées sous forme de tirages uniques. Les dimensions ainsi que les caisses américaines ont leur importance dans la narration et la présence de l’image au sein de l’espace d’exposition.

Le désir de capter l’oeil du regardeur est primordial, les photographies agissent comme une fenêtre ouverte vers un ailleurs, entre notre réalité et une réalité subjective, propre au spectateur. Les images sont laissées à l’interprétation, à la manière du phénomène physique de la réfraction dont l’idée est que la perception des choses est changeante en fonction de la surface traversée. Ces surfaces sont ici les photographies, simplement numérotées pour ne pas diriger leur lecture. Nous nous trouvons entre la réalité et la fiction, face à des scènes qui ressemblent à des flashs, dans le flou ou dans la précipitation, issues d’un cauchemar ou d’un rêve. Les images se laissent faire, elles se laissent être scrutées, décortiquées, autopsiées. L’oeil navigue du noir profond vers le doré des objets plaqués or qui attirent le regard comme un appât.

Ce combat entre lumière et obscurité rappel l’âge d’or Hollandais et donne à la photographie une structure, un ancrage dans l’espace, une aura picturale. Face à cette présence, le spectateur devient acteur. Il se doit d’être actif, se nourrissant de son univers personnel, porté par sa propre subjectivité, pour que réfraction se passe, que les personnages de notre inconscient viennent à leur tour habiter ces univers immersifs.

L’or et le doré ne sont pas des couleurs anodines. Beaucoup utilisées en religion, elles représentent la lumière, le luxe et la richesse dans l’imaginaire collectif. L’or peut nous porter bonheur ou à défaut nous mener à notre perte. En opposition au noir profond mettant en apesanteur le sujet, le doré attire le regard, il devient un point lumineux, central. Appliqué sur des objets de la vie courante et de consommation cette couleur attribuée aux dieux et aux rois prend une aura de factice, d’anti-précieux. Nous ne pouvons cependant, nous empêcher de voir et de considérer ce qui en est recouvert, de troublants objets de désir.

Au-delà de l’aspect onirique de certaines situations, qui se voit renforcé par le doré, l’ancrage au réel des photographies reste primordial. Des lumières directement gérées au moment de la prise de vue photographique, peu ou pas de retouches numériques postproduction, permettent d’introduire le spectateur à un nouvel univers, tout en se liant à la réalité qu’il connaît déjà.

Commentaire par Ludivine Felden.